Sujets du Bac, Philo.
Voilà bien l'exception culturelle française dans toute sa splendeur : Nous sommes les seuls au monde à proposer comme première épreuve du Bac, toutes sections confondues, une épreuve de philosophie.
Et c'est très, très bien : au moins une fois dans leur vie, tout bachelier aura tenté de penser.
Le millésime 2007 n'est pas le plus mauvais :
I. - Section Littéraire (coef 7) :
I.1 - Toutes prises de conscience est-elle libératrice ?
Je sens poindre une once de cynisme…
Que vaut la Liberté sans conscience ? Au moins d’elle-même…
Qu’est-ce que la Liberté et comment en prendre conscience ? Peut-on en cerner les limites ?
Qu’est-ce que la conscience de soi-même et le sentiment de Liberté ?
Un triptyque infernal à traiter… en 4 heures.
Pas facile, mais faisable.
I.2 - Les œuvres d’arts sont-elles des réalités comme les autres ?
Comme les autres ? De quelles réalités parle-t-on au juste ?
D’une réalité comme d’un fait déjà gravé dans le marbre du temps qui vient de passer ?
Le temps d’un clignement des yeux sur cette ligne…
Qu’est-ce que l’Art ?
Une façon d’émouvoir l’œil, l’oreille, la conscience ?
Une autre « lecture » de la réalité factuelle.
Rien de plus ?
Nécessairement et seulement ?
Question subsidiaire : L’art s’inscrit-il nécessairement dans la durée ? Le temps qui s’écoule… Sans lui, pas de musique, pas de danse, pas de pyrotechnie, pas de comédie, pas de rire, pas de sanglot, pas d’émotion. Pas de conscience.
Sans le temps univoque, qui va du passé vers le futur en passant par le présent et non l’inverse, pas d’humanité possible non plus.
L’art est-il d’ailleurs la signature de l’humain (avec le rire qui est son « propre ») ?
Est-ce que l’art peut se retrouver dans une équation mathématique qui explique le mécanisme de l’Univers ou une partie de celui-ci ? Et émouvoir de la même sorte…
I.3 - L’éthique à Nicomaque vue par Aristote et la responsabilité : un classique, sans même me souvenir du texte.
Choix, libre arbitre, liberté, conséquence : responsabilité !
Peut-on échapper à ses responsabilités ?
Est-on libre de ses actes ?
La réponse, au moins partiellement appartient aux situationnistes, mais pas seulement.
Et puis Aristote ne connaissait rien du situationnisme : De ce point de vue, c’était quand même un « basique ». Éclairé, certes, très même…
Par ailleurs, la « Responsabilité » vue par le croyant (entre le « Inch Allah » et « Dieu le veut ») n’est déjà pas la même par rapport au non-croyant.
Même si ce n’était pas les mêmes dieux.
Par contre, je ne sais plus s’il avait pu connaître de Périclès : le texte me l’aurait fait savoir. Périclès désigné, via la Pythie par les dieux pour conduire les affaires de la cité, plusieurs fois de suite… Que s’en était suspect ! Et pourtant on a parlé « d’âge d’or »…
II - Section scientifique (coef 3) :
II.1 - Le désir peut-il se satisfaire de la réalité ?
Arf ! Le désir n’est-il pas l’attirance pour une autre réalité que celle qui est a portée de main !
La satisfaction du désir n’est-il pas la source de tout « plaisir » ?
L’humain n’est-il pas constitué de la sorte qu’il cherchera toujours et encore les plaisirs d’être satisfait, soit en émoussant tout désir (façon stoïcien), soit en l’éteignant (façon épicurien) ?
II.2 - Que vaut l’opposition du travail manuel et du travail intellectuel ?
Gag ! Qu’est-ce donc que le travail ? La fourniture d’un effort en vue de réaliser une tâche ?
Quelle opposition entre un effort physique et un effort « intellectuel » ?
Tous les deux ne monopolisent-ils pas l’Esprit quand il est le fait de l’Homme ?
Jusqu’à distraire de Dieu, nous disait Pascal…
Pour des scientifiques, le travail peut aussi être réalisé par des machines : c’est le Joule, le Watt.
Sans conscience, elles.
II.3 - Un texte de Hume à commenter, extrait d’Enquête sur les principes de la morale… Sur le thème de la justice…
Justice, droit, loi, équité, égalité, morale, etc.…
Voilà des thèmes rigolos à traiter.
Auquel on pourrait rajouter que le principe d’égalité prédomine sur celui de l’équité, parce que justement, traiter de l’équité consiste à trouver des solutions différentes à des choses dissemblables (dixit Pascal encore), ce qui est contraire à l’égalité.
Et en matière de droit, c’est bien la difficulté qui mène tout droit à l’arbitraire et à l’insécurité des décisions de justice, autrement dit à l’insécurité tout court : Il n’est pas naturel qu’un même meurtre crapuleux vaille 15 ans ici et perpétuité dans le ressort de la Cour d’Appel d’à côté.
C’est d’ailleurs tout le talon d’Achille des pays Anglo-saxon, dans la bonne administration de la justice, de droit dit « usuel » par rapport aux pays latins dit de droit « écrit » : Un juge du Norfolk n’aura pas la même solution à un conflit commercial qu’un juge du Suffolk. A fortiori un tribunal américain de la côte ouest, qui a des jurés populaires, par rapport aux mêmes jurés de la côte est…
D’où les kilomètres de papier du moindre contrat commercial, où tout est écrit à l’avance pour éviter les surprises en cas de contentieux.
Mais c’est déjà un autre sujet…
III - Section économique et sociale (coef 4) :
III.1 - Peut-on en finir avec les préjugés ?
Ça existe encore, cette affaire là ?
N’est-ce pas le sentiment de déjà vu, de déjà su, qui forge à la fois l’expérience et donc le préjugé ?
Ou bien le préjugé n’est-il à prendre que dans le sens d’une prise de conscience préalable à toute situation rencontrée ?
Dans les deux cas, la réponse est la même, car la question est mal posée : L’expérience est une forme de préjugé qu’on va jusqu’à enseigner dans les lycées. Ça évite d’avoir à recréer le long cheminement de sa re-découverte.
Dans le second, l’éducation a justement pour objet de faire face à des situations qui n’ont jamais été rencontrées par quiconque auparavant…
En faisant un détour par le cerveau primaire également, celui qui nous dicte nos comportements de « survie » et contre lequel on peut peu de chose si on ne s’y prépare pas !
III.2 - Que gagnons-nous à travailler ?
De la valeur ajoutée !
Pour le reste, c’est fatigant…
C’est aussi s’enrichir : 30 ans que je bosse ! 30 ans que je suis en formation professionnelle permanente pour apprendre toujours plus.
30 ans que je me dis qu’un jour, il faudra bien que je restitue tout cela… Sans ça, c’est perdu à jamais !
30 ans que je me dis que nous serons presque 7 milliards bientôt à penser la même chose…
30 ans que je constate qu’ils ont été quelques 1 ou 2 milliards à penser exactement comme moi à un moment ou à un autre…
30 ans pour constater qu’il n’en reste pas grand-chose !
Mais ce sont des préoccupations de « vieux kon »…
Le travail rend libre. Il nous enrichit l’intellect. Il nous fait découvrir tant de choses ignorées. Il nous « expérimente ».
C’est vendre son travail qui enrichit le porte-monnaie. Rien de plus.
Mais c’est un autre sujet.
III.3 - Nietzsche et la morale à partir d’un extrait de « Humain, trop humain ».
Tout dépendait de la traduction.
Mais Nietzsche était d’abord un philosophe exigeant, hélas fort dévoyé par la suite.
Inspiré par Wagner et surtout Schopenhauer, le grand-père de la philosophie pessimiste (qui commença avec Kant avec sa « Critique de la raison pure ») qui trouva ses ultimes échos parmi les existentialistes après la grande guerre avec Sartre et l’école française.
Il y avait de quoi faire…
IV - Section Technique et musique de la Danse (coef 3) :
IV.1 - L’art nous éloigne-t-il de la réalité ?
Pour des danseurs, les copies vont être marrantes…
Pour le reste, autant que je sache, l’art est plutôt une interprétation de la réalité. Une sublimation du réel.
Mais pas seulement et heureusement…
(Cf. § I.2)
IV.2 - Peut-on se passer de l’État ?
Arf…
Les pauvres : à part les subventions, qu’en connaissent-ils ?
C’est pourtant le meilleur sujet pour un béotien comme moi !
En 4 heures je me sens capable d’expliquer la nécessité de l’État.
Car en théorie, oui, on peut s’en passer. Les essais des communautés anarchistes d’antan, les kibboutzim sont bâtis sur ce principe, que de se passer de l’Autorité de l’État, donc de l’État soi-même.
Car l’État c’est moi, tous les « moi » qui veulent bien y adhérer (de gré ou non).
C’est le mythe de Tarzan et du « bon sauvage » cher aux Rousseauistes.
Dans la réalité, il en va autrement : rien que sur un terrain de foot, entre copains et pour « jouer », ça va, on peut parfois se passer d’un arbitre. Mais dès qu’il y a un enjeu, autrement dit (drôle de détour de la langue française) que ce n’est plus que pour jouer mais pour « en-jouer », ce n’est déjà plus possible.
Alors quand on compte des centaines de milliers de personnes, qui ne se connaissent pas toutes, ça devient plus difficile qu’à 22…
Après, on peut décliner sur le rôle de l’État, ses domaines régaliens et les autres.
Mais c’est un sujet de sciences politiques.
Z’après, mais c’est de la finance publique appliquée, on peut se demander combien tout cela peut coûter, et jusqu’à combien des créations de richesses d’un pays…
(Cf. III.2).
IV.3 - Epictère et la Liberté.
Rigolo, ça : Entre le « Travail » (qui rend libre, cf. § II.2) tiré de la « morale » vue par Nietzsche (cf. § III.3), en passant par la « justice » traitée par Hume (cf. § II.3), la responsabilité vue du côté d’Aristote (cf. § I.3), normal qu’on retourne à la Liberté après l’avoir prise comme premier sujet (cf. § I.1)…
En voilà des agrégés qui ont dû se creuser le neurone pour préparer des corrigés types !