La lutte contre le tabagisme est une priorité de santé publique. Il était temps : Aucun oncologue au monde ne sait soigner le cancer des poumons. Avec la multiplication des consommateurs, ils annoncent même une catastrophe sanitaire, dans les décennies à venir, dont les effets des canicules estivales et des migrations routières réunies seraient réduits au niveau d’une mauvaise plaisanterie.
Aucune autre méthode ne semblant efficace, les autorités font le choix de faire « mal au portefeuille ». Et c’est tant mieux.
I – Au premier chef, pour les non-fumeurs.
C’est autant de recettes fiscales qu’ils n’ont pas à assumer par l’impôt sur le revenu. Après tout, si les fumeurs sont décidés à fumer des taxes et un peu d’herbe séchée enroulé dans du mauvais papier avec des revenus déjà imposés, nous sommes dans un pays de liberté, c’est leur problème !
D’autant que les fumeurs mourrant plus jeunes (une dizaine d’année environ) et plutôt sur leur fin de vie (loi mathématique normale), c’est autant de cotisations de retraite qu’ils payent (ou épargnent) pour rien pendant leur période d’activité et des pensions mieux garnies pour les non-fumeurs…
Contrairement à une idée reçue assez ridicule, leurs cotisations aux régimes de santé alors qu’ils sont en activité et en pleine santé, à la force de l’âge, couvrent plus que largement, les dépenses de soins que leur tabagisme pourrait engendrer. 80 % des dépenses sont le fait d’un peu plus de 5 % des assurés. Ce n’est sûrement pas eux : ils meurent bien avant de coûter trop cher !
Tout fiscaliste bien né a remarqué que la nouvelle loi de finances (pour 2004) fait un cadeau magnifique aux non-fumeurs.
En modifiant l’article 762 du CGI relatif au barème légal du démembrement de propriété entre usufruit et nue-propriété, elle a pris en compte l’actualisation des tables de mortalité générale fumeurs et non-fumeurs confondus, donnant un avantage économique certain à ces derniers.
On respire mieux, car les assureurs privés savent très bien faire cette différence et depuis fort longtemps.
Cet ensemble de discriminations, même s’il tord un peu le cou au principe d’égalité des citoyens[1], est toutefois contrariant.
II – Soit cette politique du portefeuille agressé échoue (A) parce que « le mal » se déplace, soit elle réussit (B) et, selon la volonté du ministre de la santé, il n’y aura plus une seule cigarette en France
II.A – La méthode échoue. C’est que le fumeur persiste et louanges lui soient rendus pour les services décrits ci-avant qu’il rend à ses concitoyens. A moins qu’il trouve le moyen de s’approvisionner hors du champ d’application des taxes assises sur le tabac.
On pense tout de suite aux « vendeurs à la sauvette » dont on promet qu’ils encourront, désormais des peines de prison. La police déjà débordée, les tribunaux déjà saturés, les prisons bondées, vont-ils pouvoir absorber ce flux nouveau ?
On le leur souhaite…
Hélas, la loi douanière et fiscale permet l’importation de produits de tabac manufacturés pour un usage personnel (avec interdiction de la revente) en totale détaxation. Internet offre déjà de commander et de se faire livrer ses cartouches exonérées des impôts depuis le pays expéditeur (détaxe à l’exportation), via les services postaux (qui sont peu onéreux aux Pays-bas par exemple), devenant receleurs de produits, peut être, bientôt prohibés.
La poursuite des revendeurs illégaux, établis sur le territoire français pourra se poursuivre, mais il sera toujours matériellement impossible de poursuivre les consommateurs (trop nombreux, trop disséminés, comme pour la redevance télévisuelle) usant du mécanisme légal de libre circulation des biens et des personnes, ultra-protégé par Bruxelles, elle pourrait être juridiquement impossible car elle serait une entrave grave aux traités de Rome et aux suivants.
On vérifiera ainsi ce que l'économiste américain Arthur Laffer, à travers sa courbe en cloche, tente d’expliquer quant aux relations entre le taux de l'impôt et le montant des recettes fiscales, à savoir que trop d’impôt tue l’impôt[2].
II.B – Cette politique réussit et c’est la débâcle financière des régimes sociaux déjà mal en point. L’équilibre est déjà suffisamment précaire (la loi elle-même prévoit un ré-examen de ces régimes en 2014) ce sera, à coup sûr, soit une dégradation de l’offre de soins, soit un coût bien supérieur à ce qu’il est déjà. Où va-t-on ?
C’est aussi la faillite de près de 30.000 buralistes, de milliers de producteurs, toute la chaîne logistique, avec son cortège de chômeurs à reconvertir (formation, redéploiement) et à indemniser, de passifs devenus irrécouvrables, de fonds de commerce qui ne trouveront plus de locataire ni preneur. Bref de la destruction de valeur. Qui va encore payer ?
C’est toujours le « Kochon-de-Kontribuable » devenu non-fumeur (les ex et les nouveaux).
La seule solution sera donc d’anticiper en créant une taxe nouvelle, « citoyenne », dont seraient exonérés les fumeurs.
Ce ne serait qu’un juste retour des choses, au nom de la solidarité chère à nos gouvernants, et tout simplement au nom de l’équité : Après tout, on doit tellement de choses aux fumeurs qu’ils peuvent être regardés comme des héros mettant, tous les jours, leur vie en péril pour le bonheur prolongé d’autrui. Quelle abnégation !
Là, il faut dire halte ! Aux armes citoyens ! L’affaire est grave…
Il faudrait aussi créer une brigade spéciale à moins que les gendarmes, déjà épuisés à surveiller nuit et jour leur radars automatiques sur les routes de France et de Navarre, soient obligés de vérifier le taux de nicotine des conducteurs et passagers majeurs tout comme ils le font déjà du taux d’alcool : C’est eux qui vont rendre les armes…
Est-ce bien raisonnable ?
En tout cas, non-fumeurs du pays, il faut rester vigilant : on entre manifestement dans une période néfaste à la liberté parce qu’elle est surtaxée (aujourd’hui les fumeurs, demain les autres, a minima et par ricochet).
Dans ce pays, le bon sens est-il liberticide ou simplement taxogène ?
[1] Notamment quant au principe du critère d’utilité des dépenses communes dégagé par la jurisprudence, par exemple, pour les charges de copropriété. Mais la charge publique n’a peut être pas à être utile, comme chacun le sait déjà… [2] On l’avait déjà vérifié en France avec feu la vignette automobile : Le désert de recettes de la Creuse et la surpopulation de la Marne n’était curieusement pas en corrélation avec la population automobile réelle… Le dernier chic est, désormais, d’immatriculer les véhicules de sociétés en Allemagne. Ca leur évite le paiement de la fameuse vignette et d’autres taxes en France.