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Capitalisme financier et crise des « subprimes » : Le capitalisme est-il compatible avec le libéralisme ?
Trop souvent beaucoup confondent libéralisme et capitalisme. L'un est assimilé à l'autre, l'autre pollue l'un.
Ce sont pourtant de notions différentes et en ce début de semaine, nous en avons eu la démonstration brillante par quelques acteurs au sommet de leur science économique.
Il suffisait de lire :
1ère citation (Le Monde) :
« Samedi 13 et dimanche et 14 septembre, les patrons des principales banques d'affaires et de dépôt et de grands fonds d'investissement américains, dont certains ne cherchaient plus à masquer leur effroi, ont défilé dans les locaux new-yorkais de la Fed (Réserve fédérale, banque centrale américaine) pour être reçu par Henry Paulson, le secrétaire américain au Trésor, et les plus hauts responsables de son ministère. »
Vous avez bien lu : le ministre des finances, le Secrétaire d'État au Trésor, reçoit le gotha de la finance dans les locaux de la Fed...
C'est dire le degré de complicité et de collaboration entre le pouvoir exécutif, responsable de la politique budgétaire, et la Banque centrale, responsable de la politique monétaire...
Imaginez, en Europe, la réunion du Conseil Ecofin, avec Madame Lagarde, dans les bureaux de Jean-Claude Trichet à Francfort !
L'horreur !
On préfère se concerter par communiqué de presse...
L'essentiel n'est pas de lutter contre la récession, mais de maintenir « l'indépendance de la BCE »...
On a les priorités que l'on peut, n'est-ce pas...
2ème citation :
« Toutes les tentatives du trésor américain pour dégager une solution de sauvetage ont échoué. Bank of America a renoncé la première. Dimanche après-midi, le patron de l'autre candidat à la reprise, le britannique Barclays, se retirait également. Il avait, comme Bank of America, cherché à obtenir un engagement public dans les mêmes conditions que celles offertes il y a six mois lors de l'acquisition de la banque Bear Stearns par JP Morgan, soit un financement global du rachat par l'État. Jusqu'au bout, M. Paulson s'y est refusé, comme il l'avait fait dès vendredi. »
Vous avez bien lu : les dirigeants de Bank of America et ceux de Barclays n'acceptaient de sauver Lehman Brothers - c'est-à-dire de la racheter - qu'à condition d'un « financement global du rachat par l'État » ! Ce qu'avait obtenu JP Morgan - 29 milliards de dollars de la part de l'État US - pour « sauver » la Bear Stearns... Et finalement c'est le représentant de l'État, ministre des finances, le secrétaire d'État au Trésor H. Paulson, qui a été, à son corps défendant il est vrai, le plus libéral, laissant finalement, en désespoir de cause, le marché sanctionner la mauvaise gestion, au risque d'une faillite déclenchant la panique boursière...
J'aime bien cette idée d'acheter quelque chose... avec l'argent de l'État, l'argent des autres (qui parfois n'existe pas encore) !
Pourquoi se gêner ? Confondrez-vous z'encore « capitalisme », ou les comportements des capitalistes, avec le « libéralisme »...
Le « libéralisme » est un corps de doctrines, souvent invoqué par les capitalistes, lorsqu'il coïncide avec leurs intérêts, qu'ils oublient d'invoquer dès qu'ils ne coïncident plus...
C'est pour cela que les « capitalistes » ont pu être, historiquement, mercantilistes et esclavagistes pour exploiter les colonies et être protégés de la concurrence étrangère.
Ils ont pu être « keynésiens » pour relancer leurs débouchés, « nazis » sous Hitler pour les bienfaits des commandes publiques d'armement, « libéraux » surtout quand il faut faire régner plus de concurrence... chez leurs fournisseurs, et même « communistes » comme en Chine aujourd'hui, où l'embrigadement des ouvriers dans des usines sans syndicats libres n'est vraiment pas du tout pour leur déplaire...
3ème citation, (la meilleure) :
« Le cours normal de la finance, c'est qu'il y a des gagnants et des perdants », a expliqué M. Greenspan, dimanche sur la chaîne ABC.
La notion centrale du libéralisme, qui en fait une doctrine optimiste, susceptible d'emporter l'adhésion de tous, c'est celle « d'échanges mutuellement avantageux »... (gagnant-gagnant).
L'économie de marché est censée fonctionner à l'avantage de tous, dans un « win-win » généralisé...
Et voici qu'un des plus éminents spécialistes des marchés financiers, « Magic Greenspan » soi-même, vient nous expliquer que non seulement le « capitalisme » fonctionne sur le mode « gagnant-perdant », mais que c'est aussi son fonctionnement « normal » !
Un monde de certitudes qui s'effondre...
4ème citation :
« De son côté, la Fed autorisera temporairement les banques à emprunter en apportant des titres risqués et difficilement vendables, afin d'atténuer le choc de la probable disparition de Lehman Brothers. »
C'est aller très loin dans le rôle de « Prêteur en dernier ressort », que peut jouer une banque centrale... Non seulement la plupart des libéraux sont contre ce rôle, et certains même, opposés à l'existence d'une banque centrale (Hayek).
Là, ce n'est même plus fournir des liquidités centrales (de l'argent public donc, que crée une « BC ») en échange de créances sur l'économie, sur le Trésor, ou sur l'étranger (contre devises), c'est carrément transférer à un organe public, la Banque Centrale, les seules mauvaises créances, le risque pur sans la moindre contrepartie en espérance de gain, et cela en échange de bons et loyaux dollars publics...
Le partage « public/privé » des tâches en devient une petite merveille : au public les mauvaises créances que le secteur privé a commis l'erreur d'accepter (ou d'émettre) ; au privé les bonnes créances et le bon argent public qui redonne confiance !...
C'est d'ailleurs le sort des meilleurs actifs de la banque Lehman Brothers au profit de la Barclays, depuis...
En ces moments de discours libéraux récurrents sur les « assistés », sur « l'assistanat », le RSA et sur tous ceux qui vivraient aux crochets de l'État-providence, il faudra se souvenir que les « assistés » ne sont manifestement pas toujours ceux que l'on propose démagogiquement à la vindicte populaire...
Il est vrai que les montants ne sont pas comparables : ce que vont recevoir, plus ou moins directement, les actionnaires de la finance de la part des États, pour leur éviter d'être victimes de leurs propres erreurs de gestion, est évidemment bien supérieur à ce que recevront les bénéficiaires de l'assurance-chômage ou du RSA.
On cherche désespérément ici 5 milliards d'euros pour financer le RSA (soit à peu près l'équivalent des seules pertes de Kerviel pour la Société Générale), mais on trouve là, sans aucune difficultés, 200 milliards de dollars pour sauver Freddie Mac et Fanny Mae, et toutes les banques qui en dépendent...
Privatisation des profits, nationalisation des pertes !
Le « Capitalisme sauvage » n'est décidément à ne pas confondre avec le « libéralisme », même débridé !
DD
PS : Perso, je reste persuadé qu'ils seront nombreux à faire cet amalgame, ignorants qu'ils restent !
Deuxio, force est de reconnaître que les temps changent : celui où mon « pape à moi » (Maurice Cozian, fiscaliste 10ème dan) énonçait que « Le fisc (l'État) n'est pas l'assureur tout-risque du contribuable » semble désormais révolu...
Au moins pour les « majors » des promos des « grands corps »...
PPS : Désolé VCRM : « DD » m'a donné son autorisation de publier son post avant toi (version dopée)... Et comme j'ai du boulot en semaine, je pare au plus pressé !
Mais ce n'est que partie remise : ne te vexe pas ! Ça reste une « bonne amorce » sur « l'acculture économique » ambiante en « Gauloisie supérieure » et autres terres découvertes à marée basse !
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