Petits rappels historiques avant d’aborder la « taxe Tobin ».
Parce que bon, tout le monde parle des exemples suédois et autres, mais non seulement l’impôt des bourses existe encore en Grande-Bretagne, mais elle existait jusqu’au 31 décembre 2007 en « Gauloisie imposable ».
Il s’agit de ne pas l’oublier : « Bling-bling » supprime des taxes en début de mandat, pour les réinventer en fin de mandat !
Un type vraiment extraordinaire de fatuité, à ce jeu-là !
I – En Grande-Bretagne on retrouve l’existence d’une taxe sur les transactions financières qui ne préjuge pourtant pas du succès de leur place financière, taxe qui frappe l’achat d’actions anglaises, le « stamp duty » pour les transactions utilisant un formulaire papier, ou le « stamp duty reserve tax » pour les autres.
Certes, ce droit de timbre, instauré lui aussi à la fin du XIXème siècle, ne s’applique par à toutes les opérations financières. Il ne concerne que les achats d’actions d’entreprises britanniques et doit être acquitté par tout acheteur, qu’il soit résident britannique ou non.
En plus, quelques exemptions sont prévues.
Mais son taux est élevé, pour être fixé à 0,5 % des valeurs.
De la sorte, il génère une collecte de l’ordre de 3 milliards de livres par an tous les ans.
Le droit de timbre britannique est donc plus lourd que ne l’était l’ex-impôt de bourse Gaulois sans qu’il n’ait jamais été question de délocalisations de Londres à Paris, bien au contraire.
Dès lors, on peut aussi comprendre « Camé-Rhône » que de ne pas vouloir, soit en rajouter, soit voir imputer les recettes de la Couronne, même d’une petite partie au profit de l’Euros auquel son pays ne participe pas…
J’aurai fait pareil : On est ou on n’est pas en zone euro.
Notez également que ce « lourd tribut », trois milliards, ce n’est pas indolore, même sur une assiette de 600 Md£, alors que les flux sont très nettement supérieurs (on verra ça une autre fois), ça n’a jamais empêché la City de drainer l’essentiel des flux européens en bourse.
Les brokers anglais restent encore et toujours les princes de la finance européenne : On les voit mal accepter des « leçons de gouvernance » de l’Euroland émanant des diktats de « bling-bling » juché sur ses talonnettes, qui n’y connaît rien de rien à leurs yeux.
Bref, on peut comprendre…
II – En « Gauloisie miraculeuse », l'impôt de bourse était en fait un « droit de timbre » pouvant doubler le coût d'une acquisition d'actions, notamment depuis la forte baisse des frais de courtage.
Je rappelle que le « timbre » de dimension a disparu pour l’essentiel au 1er janvier 2007.
Un jour, je vous ressortirai mon cours sur le sujet, parce que c’est une des recettes les plus anciennes de notre fiscalité passée.
L’impôt de bourse pour en revenir au sujet, concernait principalement les opérations supérieures à 7.668 € et équivaut à 0,3 % du montant de la transaction.
La décision de le supprimer a été prise dans le courant du mois de novembre 2007.
Et l'impôt de bourse a été officiellement disparu le 1er janvier 2008.
Pour avoir le « droit d'être imposable », vous deviez être résident de « Gauloisie éternelle ».
Un non-résident n'avait en effet pas le « privilège » de le verser.
Pour se faire, encore fallait-il que le non-résident passe directement son ordre via une société de bourse, ou entame une procédure de « régularisation » si son ordre a été passé via sa banque habituelle. En effet, la société de bourse connaît votre statut de « non-résident » contrairement à la banque.
Toutes les opérations de bourse étaient concernées par cet impôt. Les opérations d'achat, de vente, au comptant, à terme, effectuées via des intermédiaires financiers sur les valeurs « Gauloise » et étrangères cotées à l'étranger, étaient ainsi imposées.
Toutefois, il existait de nombreuses exonérations qui s'expliquaient le plus souvent par des décisions politiques destinées à favoriser certaines catégories de titres.
Sept exonérations principales portant sur les opérations sur :
– Les valeurs cotées dont la capitalisation boursière est égale ou inférieure à 150 millions d'euros, afin de favoriser l'investissement ;
– Les warrants ;
– Les valeurs cotées sur le Marché Libre OTC, marché de gré à gré ;
– Les valeurs provenant de places boursières régionales ;
– Les souscriptions de titres lors des introductions en bourse ;
– Les valeurs américaines cotées aux États-Unis ;
– Les obligations dans leur grande majorité ;
– La souscription d'OPCVM (FCP, Sicav...) ;
– Et les valeurs du Trésor.
L'impôt de bourse était donc en pratique exigible sur les valeurs de l'Eurolist lors des achats / ventes.
À noter que le report de titres sur le SRD équivalait à une opération d'achat/vente, l'impôt de bourse était donc exigible.
L'impôt de bourse prenait comme base d'imposition le montant de la transaction.
S'il s'agissait d'un achat de 15 titres d'une valeur unitaire de 157 €, la base d'imposition retenue sera de 15 x 157 = 2.355€.
En généralisant, la base d'imposition est égale au cours de la transaction x nombre de titres.
Ce cours de transaction correspond au cours de compensation dans les opérations dites de report.
Vous aurez noté que les frais de courtage ne servaient pas de base de calcul à l'imposition alors que c’est aussi une partie du prix d’acquisition…
Une fois la base d'imposition calculée on y applique le taux correspondant, à savoir :
– 0,30 % pour les opérations inférieures à 153.000 € ;
– 0,15 % sur la tranche dépassant le seuil de 153.000 €.
Avec un abattement de 23 € ensuite soustrait de la somme obtenue.
Sur une transaction de 230.000 €, par exemple, on appliquait le taux de 0,30 % sur les 153.000€ (1er seuil), et le taux de 0,15 % sur les 77.000 €. On soustrayait ensuite l'abattement de 23 € pour atteindre un impôt de bourse à verser de 551,50 €.
Dans tous les cas, le montant de l'impôt de bourse est plafonné à 610 €.
Tout cela n'était que théorique. Car cet impôt n'était dû que s'il atteint les 1 euro, soit plus de 0,49 euro arrondi au niveau supérieur était dû.
Donc l'opération n’était imposable que si elle dépasse les 23,49 euros avant abattement.
Pour se faire, votre ordre devra être de : 7.830 € x 0,30 % = 23,49 € avant d’entrer dans l’obligation d’acquitter son dû au Trésor public.
Ainsi, toute opération inférieure ou égale à 7.830 euros n’était jamais imposée.
Car tout impôt porte toujours en lui les germes de la façon dont le contourner.
D'après les calculs réalisés et grâce à l'abattement de 23 €, on pourrait facilement prétendre à fractionner les ordres afin que ces derniers ne franchissent pas le seuil des 7.668 €.
En effet, jusqu'à ce seuil, le niveau de l'impôt à verser était nul.
Mais attention, le fractionnement d'un ordre boursier dans le seul but d'échapper à l'impôt est totalement interdit : Il était analysé comme d'un « abus de droit » (art. L 64 du LPF) fiscal, le fractionnement opéré n'ayant pour but que d'échapper à l'impôt.
Ainsi, un investisseur effectuant 3 ordres similaires de 7.668 € chacun pourrait se voir contrôler et redresser pour abus de droit.
Toutefois, si vous prouviez que vos ordres avaient des finalités différentes ou bien que le fractionnement ait pu vous apporter un bénéfice autre que fiscal, l'abus de droit ne pouvait être retenu contre vous.
C’est ainsi que certaines grilles tarifaires de brokers pouvaient ainsi être plus favorables si vous ne franchissez pas le seuil des 7.668 €.
Il était assez courant de passer un ordre de 7.668 € à cours limité, un autre à seuil de déclenchement différent et même un 3ème au prix du marché comptant, sans subir de redressement.
À quatre le même jour, et sur les mêmes titres, bonjour les dégâts…
À noter que l'impôt de bourse influençait nettement et fortement le comportement des investisseurs privés puisque la grande majorité des ordres boursiers se situent sous les 7.600 euros. Barrière psychologique ou intérêt fiscal ?
Du coup, le tout a été supprimé par « Bling-bling » pour faire sauter ce seuil et favoriser les flux d’investissement.
Faut dire qu’avec à peine 300 M€/an de recettes, par rapport au 3 Md£ de la City, franchement, on ne boxait pas dans la même catégorie.
Alors quand il y revient via sa « Taxe Tobin », on aurait tendance à penser qu’il nous fait du Feydeau en abusant des « portes et placards ».
Rappelons aussi que l’impôt de bourse n’est pas à confondre avec la fiscalité des plus-values : L’un est un droit indirect qui taxe ad valorem, l’autre est un impôt direct sur les gains et revenus de capitaux mobilier !
Petit rappel des taux d'imposition des personnes physiques dans quelques pays :
– Allemagne : Dividendes 28,5 % ; Plus-values d'actions 26,4 %.
– Belgique : Dividendes 15 ou 25 % ; Plus-values d'actions 0 %.
– États-Unis : Dividendes 15 % ; Plus-values d'actions 15 %.
– Royaume-Uni : Dividendes 32,5 % ; Plus-values d'actions 40 %.
– Suisse : Dividendes 30 % ; Plus-values d'actions 0 %.
– « Gauloisie d’amour » : Dividendes 29 % ; Plus-values d'actions 29 %.
Chacun pourra constater que mon pays est presque un « paradis fiscal » quand on le compare à nos voisins britanniques.
Naturellement, c’est nettement plus compliqué que ça : Les assiettes sont parfois différentes, chez nous il convient de tenir compte de la CSG, du bouclier fiscal, de la fiscalité de détention du patrimoine et inversement de toutes les « niches d’exonération » (PEA, PEP, Assurance-vie, etc., etc.).
Vous aurez aussi à payer des droits de mutation sur toutes les cessions de parts (de SARL par exemple et non pas d'action de SA) dès lors qu'un écrit est obligatoire pour les constater.
I-Cube 23/01/2012 08:27
Vladimir Vodarevski 21/01/2012 14:15